Point de vue - Questions de la section Yitzhak Rabin

Publié le par Citoyen du monde

Le 16 octobre 2007
 
Remarques liminaires

A l’exception de la sixième question, le questionnaire que vous proposez aux « candidats à la candidature » est d’une particulière densité. Il porte sur des problèmes très complexes et parfaitement résumés dès 1919 par monsieur David Ben Gourion, futur premier Premier ministre, qui, lors d'une réunion de la direction du Yishuv déclarait : « Tout le monde ne voit pas qu'il n'y a aucune solution à cette question... nous en tant que nation voulons que ce pays soit à nous, les Arabes comme nation, veulent que ce pays soit à eux ». 

Bien des talents et des bonnes volontés se sont exercés à les résoudre depuis les années 1947 – partage de la Palestine -, 1948 – proclamation de la naissance de l’Etat d’Israël – et 1949 – première guerre israélo-arabe – sans pour l’instant avoir pu leur trouver de solution durable. Je ferai donc preuve d’une grande modestie dans mes réponses.

- Es-tu favorable à l’émergence d’une nouvelle force nucléaire militaire au Moyen-Orient ?  

Clairement, non. Pas plus au Moyen-Orient qu’ailleurs.

 

- Quels sont les interlocuteurs privilégiés, légitimes et nécessaires à l’aboutissement du processus de paix au Proche-Orient ?

A l’exception des peuples directement concernés et de leurs représentants, je ne crois pas que l’on puisse parler d’interlocuteurs « privilégiés ». Aucun homme, aucune femme de bonne volonté, susceptible de pouvoir apporter une contribution positive pour qu’enfin la Paix et le Développement règne dans l’ensemble de la région ne me semble à exclure, à l’image des signataires de l’Accord de Genève pas exemple.

Quels interlocuteurs légitimes ? Pour avoir protesté en son temps contre l’argument trop souvent donné de l’absence « d’interlocuteurs valables » lors d’autres conflits, j’ai la conviction que les interlocuteurs « légitimes », dans tout conflit, sont ceux que ce sont donnés les peuples directement impliqués et premières victimes de ses effets. L’histoire montre d’ailleurs bien que l’on finit toujours pas négocier la paix avec les leaders de l’adversaire, quelle que soit la façon dont ils ont été désignés.
 

Quels interlocuteurs nécessaires ? Tout interlocuteur qui peut apporter sa pierre à l’aboutissement d’un processus de paix doit être le bienvenu. 

- Quels sont, à l’heure actuelle, les obstacles à l’aboutissement de la paix au Proche-Orient ?
 

Là, je crois que vous êtes mieux placés que moi pour répondre à cette question ! 

Ceci dit, après trois voyages dans votre beau pays et en ne m’intéressant ici qu’aux questions strictement israélo-palestinnennes – même si, bien entendu, d’autres pays de la région sont sources, causes ou victimes d’autres conflits -, j’ai le sentiment que la question du statut de Jérusalem, celle du démantèlement total ou partiel des « colonies » et du financement de la réinstallation des « colons » en Israël ainsi que celle du retour éventuel de Palestiniens en terre d’Israël ou d’aides sérieuses à leur installation dans leur future patrie, sont des obstacles très importants.

Mais je vois également au moins deux autres questions plus rarement évoquées au stade des propositions opérationnelles : celle de l’approvisionnement en eau des deux Etats et celle évidemment vitale de la sécurité d’Israël.

- Es-tu favorable à l’octroi d’une aide financière aux palestiniens ? Dans l’affirmative, sous quelle forme, par qui et à qui doit-elle être donnée ?

Pour autant que cette aide aille effectivement aux populations en grande difficulté – et en particulier aux mères et à leurs enfants -, oui, je suis favorable à une aide financière comme je le suis partout quand des peuples souffrent (Rwanda dans le passé, Darfour aujourd’hui, etc.). Je considère cependant qu’elle doit être assortie d’objectifs et de conditionnalités fixés à leurs dirigeants, ceci pouvant conduire les bénéficiaires à effectuer des pressions non négligeables sur ceux-ci pour faciliter leur évolution dans le processus de paix. J’aurais aussi apprécié que l’aide européenne soit, un temps, suspendue quand des investissements financés par l’UE ont été pris pour cibles. Pour que des messages passent auprès des populations puis de leurs dirigeants. 

Par qui ? En premier lieu par l’Etat d’Israël lui-même en ne ciblant pas systématiquement – sous réserve des questions de sécurité - les travailleurs palestiniens ayant des contrats chez eux et qui leur apportent de quoi faire vivre leurs familles… sans avoir besoin des secours distribués par des organisations islamistes ou d’aides financées par les bailleurs de fonds. Ensuite, bien entendu, par qui le souhaite : UE, USA,  etc. 

A qui doit-elle être donnée ? J’ai déjà défini les populations-cibles de ces aides financières. Reste à parler des intermédiaires… Je suis, dans ce cas comme ailleurs, partisan des aides directes, distribuées sous la responsabilité des donateurs ou des associations qu’eux-mêmes peuvent créer là où cela est nécessaire ou par celles dont ils contrôlent (au sens anglais) le bon fonctionnement.

 
- Quel devrait être le « statut de Jérusalem » ? 

De la proposition d’un statut international pour Jérusalem dès 1947 (par la Commission spéciale pour la Palestine à l’AG des N-U sa résolution 181 dite « Plan de partage ») à celle de son partage faite par monsieur Ehoud Barak en 2000 au sommet de Camp David II en passant par les revendications palestiniennes du pacte de l’OLP de 1968 (mais pas dans celui de 1964) et par la proposition de « ville ouverte » de 13 Patriarches et Chefs des Eglises chrétiennes de Terre sainte de 2006, la question du statut de Jérusalem empoisonne la vie des leaders tant israéliens que palestiniens.

La proposition de monsieur Barak est probablement un des éléments de sa défaite électorale qui a suivi Camp David II. Quant à monsieur Mahmoud Abbas, tout comme feu Arafat, tout abandon sur au moins Jérusalem-Est serait perçu comme lâcheté et ferait le jeu du Hamas ! 

Mon sentiment est que personne en dehors des Israéliens et des Palestiniens n’est en mesure de définir un statut pour Jérusalem acceptable par les deux parties et par les communautés dans le monde concernées (adeptes des trois grandes religions monothéistes). Je ne me sens aucunement habilité à proposer un tel statut. Mais qu’elle reçoive le plus vite possible le Nobel de la paix me réjouirait.

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